Gad Hiram : reportage au cœur des Guédés avec Hougan Anio

La cérémonie à Gad Hiram n’est pas simplement un rituel : elle est un poème vivant et collectif, où chaque geste, chaque mot, chaque offrandes, chaque danse raconte l’histoire d’un peuple qui honore ses ancêtres et célèbre la vie.

Culture

Publié le 06-Novembre-2025

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L’arrivée et l’atmosphère
Aux premières lueurs de l’aube, Gad Hiram, 2ᵉ section communale de Ranquitte, s’éveille sous un ciel d’un bleu tendre. Les collines, baignées de brume, semblent retenir leur souffle, comme pour saluer l’arrivée des fidèles. Des centaines de familles dévalent les sentiers rocailleux, portant des offrandes – rhum, fleurs fraîches, fruits, pain noir – et s’installent autour des autels déjà dressés. L’air est saturé d’un parfum mêlant fumée d’encens, rhum et terre humide, une odeur qui préfigure la rencontre du monde des vivants et des esprits.

Les tambours et l’énergie
Les tambours rada et petwo commencent à résonner, frappés avec intensité et précision. Le sol tremble légèrement sous les pieds des fidèles, et le son s’élève, vibrant dans la vallée. Chaque battement est comme un cœur collectif, un appel aux esprits qui traversent le voile. Les chants commencent, s’entremêlant, mêlant voix graves et aiguës, murmures et cris de joie, créant un tissu sonore chargé de mémoire et de ferveur.

L’entrée des chorales et sociétés mystiques
Aux côtés de la Chorale Jeune Délivrance, âgée de 15 ans, d’autres chorales venues de différents temples et sociétés mystiques font leur entrée. Chaque groupe apporte ses chants spécifiques, ses rythmes uniques et ses costumes colorés. Ensemble, toutes les chorales forment un modèle vivant d’unité, prouvant que dans la diversité des pratiques, la communauté se retrouve et se renforce. Les jeunes tournent, sautent, dansent et répondent aux chants avec une synchronisation parfaite, tandis que les adultes observent, encouragent et participent à leur manière.

Hougan Anio au centre du rituel
Au centre, Hougan Anio, ou Ti Anio, avance avec gravité et autorité. Avec 46 ans d’expérience, il est à la fois prêtre vodou, spécialiste des traitements naturels et cultivateur respecté. Membre de KNVA et de Zantray, il guide les rites avec une poigne douce mais ferme, sa voix résonnant comme un instrument à part entière.

Il prononce la parole des esprits, exhortant les participants à abandonner le mal, cultiver l’union et l’amour, et à transmettre ces valeurs aux générations futures. Avec ses milliers de pitit fey, qu’il a élevés dans la tradition, il incarne la continuité, la mémoire et la sagesse.

Rituels et offrandes
Chaque autel est méticuleusement préparé : rhum, pain noir, fleurs, fruits et bougies sont disposés selon des schémas précis. Hougan Anio se déplace parmi eux, touchant les fronts, murmurant des bénédictions, guidant les chants et ajustant le rythme des tambours. Les fidèles déposent les offrandes avec révérence, offrant aux esprits une nourriture sacrée et symbolique.

Certains entrent en transe, leurs corps bougeant au rythme des tambours et des chants, leurs visages illuminés par une expression de communion spirituelle. Les enfants et adolescents, encadrés par les chorales et Hougan Anio, imitent et apprennent, perpétuant les gestes et paroles qui font de Gad Hiram un foyer vivant de traditions ancestrales.

Moments de transe et communion
À mesure que la journée avance, la transe s’amplifie, les danses deviennent plus rapides, les chants plus intenses. Les fidèles et les esprits semblent se confondre dans une même énergie, créant un moment d’osmose totale. Les tambours continuent de battre, chaque vibration résonnant dans le cœur de tous, rappelant la force de la communauté et la puissance de la mémoire vivante.

Un modèle de cohésion et de spiritualité
La cérémonie à Gad Hiram n’est pas simplement un rituel : elle est un poème vivant et collectif, où chaque geste, chaque mot, chaque offrandes, chaque danse raconte l’histoire d’un peuple qui honore ses ancêtres et célèbre la vie. La présence des chorales de différents temples et sociétés mystiques aux côtés du Lakou Raisin Kalbas montre que la diversité peut devenir harmonie, et que la tradition vodou est un outil de cohésion et d’unité.

Hougan Anio, avec sa sagesse, son énergie et sa bienveillance, reste le phare spirituel de la communauté, guidant les vivants et les morts, les anciens et les jeunes, dans un même souffle de foi et de mémoire. À Gad Hiram, la tradition vit, respire et danse, et chaque année, elle renaît, plus forte, plus vibrante et plus unie que jamais.

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Maxime Daniel ETIENNE

Journaliste

maximedanieletienne@gmail.com

+509 4133-8168


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