Politique

Publié le 08-Jul-2025

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Ce n’est pas le Conseil Présidentiel de Transition qui a échoué

Ce n'est pas le CPT qui échoue, mais plutôt l'ensemble de la classe politique, les partis et les organisations politiques signataires de l'accord du 3 avril 2024 qui ont échoué.

L’Accord du 3 avril 2024 est l'un des moments historiques que Haïti a connus. D'après de nombreux responsables politiques nationaux, c'est la première fois que tant d'organisations politiques se sont réunies pour concevoir un projet politique commun qui regroupe diverses tendances politiques dans le but d'instaurer une transition pacifique et ordonnée en Haïti avec la mise en place de l’accord précité. Principalement suite à une première transition dirigée par le Premier ministre Ariel Henry, qui a passé près de deux ans au pouvoir sans aucune réalisation tangible pour s'attaquer au problème de sécurité. En raison d'un engagement non respecté, la classe politique a conclu un nouveau contrat social pour restaurer l'ordre en Haïti. En effet, l'accord du 3 avril 2024 a été conclu à la suite de la démission forcée du Premier ministre Ariel Henry.

Il faut toutefois préciser que l'Accord du 3 avril découle de neuf structures politiques regroupant la classe politique haïtienne, parmi lesquelles on compte la société politique (comprenant les partis et les organisations politiques), la société civile et le secteur privé des affaires. Par ailleurs, nous tenons à souligner que l'accord du 3 avril crée une dynamique entre juge et partie en même temps, d’où certains qui sont signés l’Accord faisant partie soit de l’exécutif, soit du gouvernement. En effet, on compte vingt-trois personnalités issues de divers secteurs qui ont apposé leur signature. Néanmoins, on a découvert que huit d'entre eux sont membre du CPT, dont trois ont été coordonnateurs du CPT, en l'occurrence un ministre et deux directeurs généraux. Ainsi, ce sont diverses personnalités qui devraient assumer le rôle d'arbitre dans l'application du contrat social. Ils se sont engagé dans le système de jeu d’acteur. Cela conduira à l'échec du CPT. L’Organe de Contrôle de l’Action Gouvernementale (OCAG), qui devrait être instauré pour superviser la mise en œuvre de l'accord, a ignoré par le pouvoir en place.

Après plus de 14 mois à la tête du pays et moins de 7 mois restants de mandat, il est évident que le CPT n'a pas fait de progrès significatifs dans l'exécution des éléments cruciaux de son agenda politique transitoire, notamment le rétablissement de la sécurité, l'organisation d'élections sur l'ensemble du territoire ainsi que diverses autres tâches sous-entendues dans les articles 1, 1.1, 1.2, 11, 12, 17 et 20 de l'Accord. Selon l’accord signé le 3 avril 2024, cette période est établie pour une durée de deux ans, jusqu'au 7 février 2026 comme indiqué dans l'accord, et ne peut être prolongée au-delà de cette date. Toutefois, concernant les résultats au fil du temps, on observe une progression des gangs armés au niveau de la capitale tant dans les villes de province haïtienne et il n'existe aucun indice que les personnes déplacées en interne soient revenues dans leurs foyers. Par ailleurs, l'administration publique évolue vers une distribution de postes et de ressources publiques plutôt que d'être un outil d'exécution des politiques publiques.

N'oublions pas que l'accord a mis en place trois organes de gouvernance pour la transition. Premièrement, le Conseil Présidentiel ce qui est effectif mais outre de ces responsabilités. Par la suite, un gouvernement dirigé par un Premier Ministre, on a eu sa présence. Cependant, ces deux entités s'engagent plutôt dans une véritable guerre pour le contrôle du pouvoir, au lieu de se concentrer sur leur véritable mission définie dans l'accord. Finalement, l'Organe de Contrôle de l'Action Gouvernementale (OCAG) qui n'a jamais été instauré jusqu'à présent. En l'absence du parlement, cette instance était censée jouer le rôle d'équilibre avec le pouvoir de la transition.

En effet, ce résultat découle de l'ensemble de la classe politique haïtienne qui exploite la crédulité du peuple pour lui faire croire qu'il s'agissait d'une décision réfléchie parmi d'autres alternatives proposées. Cependant, le désordre ne cesse de croître, les habitants persistent à quitter leur résidence et la crise humanitaire ne fait qu'évoluer. De l'autre côté, une nouvelle élite de riches verra le jour suite à la répartition des postes et à la corruption qui connaît une croissance exponentielle dans la fonction publique.

Il est à noter, en se référant aux articles 12.1 et 13 de l'accord du 3 avril, que le mandat du CPT se terminera le 7 février 2026, et ce sans possibilité de prolongation. De plus, l'article 10 du décret du 10 avril 2024 stipule clairement que le mandat du Conseil Présidentiel de Transition se termine au plus tard le 7 février 2026. Il n'est pas possible d'étendre le mandat du Conseil Présidentiel de Transition. Pourrait-on envisager une résolution à l'insécurité dans les mois à venir sous cette optique ? Seul un super héros peut obtenir de tels résultats. De nombreux acteurs et secteurs politiques proposent actuellement la Cour de Cassation comme solution pour rétablir l'ordre constitutionnel en Haïti. Est-ce que ce serait le cas ? Principalement à l'égard de cette même classe politique qui a suggéré le CPT en tant qu'option alternative.

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Jonathan MEUS

Politologue

jonathanmeus6@gmail.com

50947012255


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