Haïti à l’ONU : Quand les Kényans chassent les gangs et que Saint-Cyr compte ses scrutateurs

Le Kenya fait la guerre, Haïti rêve de bureaux de vote.
Et au milieu, le peuple haïtien, lui, ne rêve plus du tout. Il voudrait juste survivre.

Politique

Publié le 23-Septembre-2025

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Ah, New York ! Les tapis rouges, les micros qui crépitent, les regards compassés… et, bien sûr, les grands discours sur Haïti. Cette fois encore, deux voix ont résonné : celle du président kényan, musclée, concrète, presque hollywoodienne ; et celle de Laurent Saint-Cyr, éthérée, bureaucratique, perdue dans les nuages électoraux.

Le Kenya en mode Rambo
Le président du Kenya a sorti son carnet de victoires : aéroport libéré, port dégagé, commissariat ressuscité, routes rouvertes, écoles et hôpitaux remis en marche. Bref, un CV digne d’un film d’action : « Mission Impossible – Version Port-au-Prince ». Et, cerise sur le gâteau, tout ça réalisé avec 40 % de l’effectif prévu. Même pas besoin du casting complet pour faire reculer les gangs : « lâches par nature », a-t-il dit, façon de rappeler qu’en face ce n’est pas vraiment du Schwarzenegger.

Un discours carré, calibré, où l’on sent le général qui veut montrer que, malgré les failles logistiques, on peut bousculer la pègre haïtienne.

Saint-Cyr en mode greffier
Puis, micro à la main, Laurent Saint-Cyr est entré en scène. Et là… fini les chars d’assaut et les commissariats restaurés, place aux bulletins de vote. Pendant que les gangs sillonnent les zones métropolitaines à motos et fusils d’assaut, Saint-Cyr nous explique que « la machine électorale doit continuer à fonctionner » et que « 70 % du personnel électoral est déjà mobilisé ».

On se pince. On vérifie qu’on a bien entendu. Oui, c’est ça : 70 % de scrutateurs prêts à servir dans un pays où 85 % de la capitale est aux mains de coalitions criminelles. C’est beau l’optimisme, surtout quand il frôle la naïveté.


Deux films, zéro rapport
Dans la même salle, deux films étaient projetés :

Version kényane : les gangs reculent, les infrastructures respirent, la population retrouve un souffle.

Version haïtienne : des urnes imaginaires dans des zones de guerre, avec des scrutateurs fantômes qui, paraît-il, n’ont pas peur des rafales.

Un contraste si violent qu’on se demande si Saint-Cyr et le président kényan parlaient bien du même pays.

Le gag final
Et pendant que l’un réclame une transition sécuritaire pour protéger les Haïtiens, l’autre brandit son chiffre magique : « 70 % du personnel électoral ». Comme si la démocratie pouvait se dérouler dans les tranchées, entre deux rafales de mitrailleuses.

Résultat : à l’ONU, le Kenya fait la guerre, Haïti rêve de bureaux de vote.
Et au milieu, le peuple haïtien, lui, ne rêve plus du tout. Il voudrait juste survivre.

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Maxime Daniel ETIENNE

Journaliste

maximedanieletienne@gmail.com

+509 4133-8168


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